À moins que vous ne soyez un athlète professionnel et que, en un clin d’œil et sans avertissement, votre corps flanche et prenne la décision pour vous, la retraite est habituellement un chemin plus ou moins long et graduel. Pour la plupart des gens, préparer sa retraite implique beaucoup de planification. Sur le plan professionnel, il faut en général préparer le terrain afin de combler le vide que vous laisserez derrière vous. C’est encore plus vrai lorsque vous occupez un poste important et devez vous-même choisir votre relève.
C’est justement l’aventure que vient de traverser Jean Robitaille, propriétaire d’un atelier de carrosserie CarrXpert. Comment choisir le meilleur candidat ? Comment préparer la relève ? Comment annoncer la nouvelle à l’interne ? Comment opérer la transition, sans perdre de clients ni de partenaires d’affaires ? C’est ce qu’il a bien voulu nous raconter.
Il y a un an, lorsque Jean Robitaille a annoncé à ses employés qu’il allait prendre sa retraite, ceux-ci n’étaient pas au courant de ce qui se préparait, même si, conscients qu’il avait passé la soixantaine, ils commençaient un peu à s’y attendre.
Mais remontons un peu le temps. Jean Robitaille est d’abord copropriétaire d’un concessionnaire automobile avec son frère. Mais ils ne partagent pas la même vision, de sorte qu’après de nombreuses années, il finit par mettre un terme à cette collaboration et vend ses parts dans l’entreprise.
C’est à la suite d’une pause de six mois que Jean Robitaille entame sa deuxième carrière en démarrant son propre atelier de carrosserie, sous la bannière CarrXpert. Les affaires vont bien et l’entreprise prend de l’expansion : elle s’associe rapidement à Mazda et Honda ; Nissan et Mitsubishi s’ajoutent en 2010 et, quand vient le moment de songer à la retraite, des discussions sont amorcées avec Volkswagen et Toyota.
C’est là que débute un processus de transition qui s’étend sur près de trois ans. Trois grands principes ont guidé Jean Robitaille dans ce processus qui l’a mené à vendre son atelier de carrosserie et à veiller à la continuité :
1. Le vent dans les voiles
Jean Robitaille croit qu’il est préférable de vendre une entreprise lorsque celle-ci a le vent dans les voiles et est en pleine croissance. Non seulement cela permet, bien entendu, d’obtenir un meilleur prix, mais aussi d’attirer des candidats de meilleure qualité pour assurer que l’entreprise continue à évoluer dans la bonne direction. Une entreprise laissée à l’abandon, qui demanderait beaucoup de travail pour la redresser, est en effet moins attrayante et la transition risque d’être plus difficile.
2. Le bon candidat
La recherche de candidats se fait de manière informelle, sur une période d’un an et demi. Il n’y a pas d’appel d’offres officiel. Jean Robitaille choisit plutôt de discuter à bâtons rompus avec différents collègues sur leurs façons de voir les choses. Au fil des discussions, trois candidats se démarquent. À ses yeux, deux critères sont essentiels dans le choix d’un successeur :
- Il doit avoir une philosophie de gestion similaire à la sienne ;
- Il doit avoir la vision et le potentiel pour faire évoluer l’entreprise et l’amener plus loin.
Au terme d’un an et demi de discussions, il arrête enfin son choix sur un collègue de Rimouski, lui aussi propriétaire d’un atelier de carrosserie, qui voit les choses de la même manière que lui et présente de surcroît l’avantage d’être déjà connu de ses futurs employés.
3. Une transition graduelle
Évidemment, au moment de faire l’annonce, le fait que les employés aient déjà rencontré leur nouveau propriétaire à l’occasion de visites d’ateliers facilite les choses. Pour assurer une continuité dans l’atelier de carrosserie, Jean Robitaille met en place un plan de transition qui s’étend sur un an. La clé est d’y aller de manière graduelle. Au départ, il accompagne son successeur dans la plupart de ses activités, et réduit ensuite peu à peu son horaire chaque mois. Il appuie le nouveau propriétaire dans les négociations avec Volkswagen et Toyota, qui se concluent avec succès. La transition se déroule à merveille, l’entreprise continue de grandir, ne perd aucun client ni aucun employé ; elle déménage même dans de nouveaux locaux qui permettent à l’atelier de se développer encore davantage.
Jean Robitaille peut prendre sa retraite l’âme en paix. Son histoire montre toute l’importance d’avoir un plan à long terme pour préparer le terrain, trouver le candidat idéal, et faire une transition dans les meilleures conditions possibles.
Ce qu’il veut laisser comme héritage, c’est une entreprise qui sait prendre soin de ses employés : l’atelier de carrosserie existe depuis 16 ans, plusieurs employés y travaillent depuis plus de dix ans et le taux de roulement est assez faible.
Au moment de prendre sa retraite, l’idée qui le guidait était de faire en sorte que son atelier, s’il revenait le visiter cinq ans plus tard, ait doublé son chiffre d’affaires. Le plan de transition qu’il a mis en place aidera assurément l’entreprise à réaliser ce vœu. Souhaitons à Jean Robitaille une retraite bien méritée.
Rédaction : Nelson Guilbert
Collaboration : Charles Aubry, Jean Robitaille
Révision : Sophie Larocque
Édition : Émilie Blanchette