La nouvelle administration américaine vient tout juste de s’installer à la Maison-Blanche, et le 47e président a d’ores et déjà fait savoir qu’il entend imposer des tarifs douaniers plus élevés sur les produits fabriqués à l’extérieur des États-Unis. Concrètement, il est question de tarifs de 25 % pour le Canada et le Mexique, et de tarifs s’élevant jusqu’à 100 % pour les biens en provenance des pays du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).

Si l’on s’intéresse de plus près à l’industrie automobile, on constate que la plupart des grands fabricants de véhicules vendus en Amérique du Nord ont une présence mondiale, avec des installations sur plusieurs continents. Nombre d’entre eux possèdent des usines de production quelque part en Amérique du Nord, allant du Mexique jusqu’au Canada, mais ils importent également des pièces d’Europe et d’Asie. Bien que ces fabricants possèdent des usines partout dans le monde, les États-Unis demeurent un carrefour central pour la distribution de pièces sur notre territoire. À l’heure actuelle, rien ne porte à croire que les fabricants déplaceront leur logistique de distribution actuelle vers le Canada pour éviter les nouveaux tarifs douaniers, mais il est possible qu’ils y réfléchissent à l’avenir.

Les répercussions sur l’approvisionnement en pièces

L’augmentation des tarifs douaniers aura fort probablement une incidence sur le prix des pièces dans l’industrie de la carrosserie au Canada, notamment pour les pièces qui transitent par les États-Unis. En termes simples, les tarifs douaniers sont une taxe supplémentaire à payer lors de l’achat de pièces. Dans le contexte qui nous concerne, c’est l’atelier de carrosserie qui paiera cette taxe lors de l’approvisionnement en pièces. Si le dossier provient d’un assureur, les coûts supplémentaires seront transférés à ce dernier, soit directement, soit sous forme de supplément. L’effet domino de ces tarifs pourrait être considérable, et il n’est pas exclu que les assurés soient aussi touchés plusieurs mois, voire plusieurs années plus tard, si les assureurs doivent augmenter leurs primes pour couvrir ces dépenses additionnelles.

Par le passé, nous avons pu constater que les tarifs douaniers perturbent également les chaînes d’approvisionnement établies. Les experts de l’industrie évoquent un phénomène connu, l’achat préventif (ou front-loading), qui consiste à importer des marchandises en plus grande quantité que prévu avant l’entrée en vigueur des nouveaux tarifs. Cette stratégie a pour objectif d’éviter les frais supplémentaires qu’engendreraient les tarifs. Cependant, l’expédition d’un volume élevé de marchandises peut entraîner une hausse de la demande pour le transport maritime ainsi qu’une augmentation du coût des conteneurs. Je suis certain que plusieurs d’entre vous se souviennent de la situation que nous avons connue pendant la pandémie, lorsque les conteneurs ont atteint le coût de 10 000 $ chacun. Cela a eu une incidence directe sur le prix et la disponibilité des produits. Et en parlant de prix, lorsqu’il y a de l’inflation ou une hausse soudaine des prix des pièces dans l’industrie, les prix à la hausse ont tendance à s’imposer comme la nouvelle norme, sans jamais retourner à des niveaux plus bas. Peut-on s’attendre à la même chose avec les nouveaux tarifs douaniers? Si tel est le cas, les primes d’assurance seront certainement touchées à long terme.

Des ruptures de stock à prévoir

Par le passé, l’imposition de tarifs douaniers a également contribué à l’augmentation des pièces en rupture de stock. Les fournisseurs, devant faire face à des coûts d’importation plus élevés, pourraient réduire leurs niveaux de stock pour atténuer les risques financiers. En conséquence, les ateliers de carrosserie se trouveraient aux prises avec des retards accrus, entraînant des inefficacités opérationnelles ainsi qu’un temps de réparation plus long qu’à l’habitude pour les clients.

La hausse des tarifs douaniers imposée par le gouvernement américain serait certainement la cause de perturbations quant au prix et à la disponibilité des pièces dans l’industrie de la carrosserie, mais ce n’est pas le seul facteur en jeu. Il faut également prendre en compte d’autres sources de perturbations, comme les guerres, les grèves ou les pandémies, pour ne nommer que celles-là. Évidemment, personne ne souhaite revivre une crise comme celle de la COVID-19, mais il y a de fortes chances que nous soyons confrontés à quelque chose de similaire au cours de notre vie. En 2024 seulement, si l’on pense aux grèves de main-d’œuvre, au moins trois événements viennent immédiatement à l’esprit. D’abord, il y a eu le conflit ferroviaire au Canada, qui aurait pu avoir des conséquences majeures en août, mais qui a été évité de justesse. Ensuite, la grève des ports de la côte Est et du golfe des États-Unis en octobre a affecté les ports allant du Maine au Texas. Enfin, même si l’effet sur l’industrie de la carrosserie était moins important, il y a eu la grève de Postes Canada, qui a duré 30 jours avant que le ministre du Travail du Canada lui-même n’impose le retour au travail des employés.

En résumé, ces situations illustrent bien la vulnérabilité des réseaux de transport mondiaux face aux conflits de travail, et mettent en évidence la nécessité d’entreprendre des négociations efficaces et d’établir des plans d’urgence pour limiter les perturbations dans la chaîne d’approvisionnement mondiale.

Bien que nous ne sachions officiellement qu’à partir du 1er février si le président des États-Unis utilise ces menaces de tarifs comme une tactique de négociation pour engager le dialogue avec d’autres pays, je pense que nous devons nous préparer au pire et accepter qu’un certain niveau de perturbation se produira au cours des six prochains mois dans le secteur de l’approvisionnement en pièces.

À propos de ProgiPièces

Progi propose une solution d’approvisionnement en pièces pour les ateliers de carrosserie à travers le Canada. Notre plateforme permet aux ateliers et aux fournisseurs de communiquer facilement les prix et la disponibilité des pièces. Bien que les pièces d’origine représentent une grande partie des ventes dans l’industrie de la carrosserie, la possibilité de se procurer des pièces recyclées et similaires est un élément clé de notre plateforme. Dans le contexte actuel de la menace tarifaire, notre solution permet aux ateliers d’acheter la meilleure pièce disponible au meilleur prix possible. Il est également possible de suivre la fluctuation des prix dans ProgiPièces grâce à la nouvelle fonctionnalité de prix instantanés lancée en 2024.


Écrit par Jean-François Potvin, ing., gestionnaire de produit sénior, avec la collaboration de Diane Chaîné, présidente.